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12 octobre 2017

EGAB, la défense de l’élevage pastoral

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Cette année, j’ai eu la chance de rencontrer un des partenaires de SOS Faim au Sénégal : EGAB. J’y ai effectué mon « terrain d’observation » dans le cadre de la rédaction de mon mémoire en anthropologie des dynamiques sociales et du développement. Dans cet article, je vous présente ce partenaire hors du commun en trois points : son identité, son champ d’action et sa raison d’être.

EGAB (Entente des Groupements Associés pour le développement à la Base) est une association d’éleveurs active depuis 30 ans dans le Nord-Est du Sénégal. L’organisation compte 2086 membres qui élèvent principalement des vaches, des chèvres et des moutons.

Etre éleveur au Sénégal, c’est devoir s’adapter à toutes sortes de conditions.

Dans cette zone aride, le bétail est à la base du mode de vie de la population. C’est aussi une activité adaptée aux aléas climatiques, la saison des pluies ne dure que trois mois et les sécheresses sont fréquentes. L’élevage pratiqué est le pastoralisme, c’est-à-dire un élevage extensif (pratiqué sur de vastes étendues) avec transhumance saisonnière. La population est sédentaire mais les troupeaux migrent en quête d’eau et de pâturages pendant les mois les plus secs.  EGAB est située dans une zone plutôt riche en pâturages, ce qui en fait une terre d’accueil et une zone de passage pour les pasteurs du Nord qui vont encore plus au Sud.

 

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Le regard d’un membre sur EGAB 

« EGAB a amené des puits. Avant ça les gens ne vivaient pas en société, ils vivaient dispersés, sur de petites parcelles. Le puits a rassemblé les gens et ça a formé le village.  Il n’y a pas mieux que l’union. Avec la dispersion il n’y a pas de lien, l’État ne peut pas subvenir à nos besoins. EGAB a fait beaucoup pour la communauté : grâce à eux il y a des banques de céréales, des aliments de bétail, l’accès aux prêts et à la formation. C’est un grand avantage pour nous »

Mboye Ka, éleveur de Djoulky

 

La gestion de l’eau, premier défi à relever pour l’EGAB

Le premier problème à régler pour EGAB était celui de l’accès à l’eau. Les éleveurs de cette zone dépendaient alors des précipitations et ne pouvaient vivre là que quelques mois sur l’année. L’association est parvenue à amener des partenaires dans cette région désertée par l’État et a construit une quinzaine de puits, ce qui a permis à la population de s’installer durablement.

Ensuite, EGAB a réalisé des actions dans le domaine de la santé et de l’éducation, notamment avec l’alphabétisation en langue locale. Aujourd’hui, l’eau est disponible grâce à la construction de nouveaux forages dotés de moteur diesel et de châteaux d’eau et de nombreux villages ont une case de santé et une école primaire.

EGAB se concentre maintenant de plus en plus sur l’amélioration de l’élevage. Avec des partenaires financiers, elle réalise des projets visant à améliorer la production, apporter des infrastructures aux éleveurs (parcs de vaccination, magasins d’aliments de bétail, santé animale, etc.) et organiser la transhumance.

 

Pourquoi, en 2017, vouloir maintenir l’élevage pastoral ?

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« Ici, la pluie peut être rare. L’État et les autres organisations doivent maintenir l’élevage extensif. Si on va vers un élevage plus intensif, c’est un risque pour nous éleveurs. Avec l’amélioration des races les bêtes ne résistent pas à ce climat. Alors oui, je suis pour la transhumance. »

Habi Ka, présidente de la fédération féminine

 

Les menaces qui pèsent sur le pastoralisme

Dans cette région enclavée, sans route ni électricité, la commercialisation n’est pas encore vraiment à l’ordre du jour. L’objectif actuel est plutôt de sécuriser le pastoralisme, qui nourrit les familles mais est menacé par un ensemble de facteurs.

Le premier est politique : peu de décideurs soutiennent le pastoralisme. Nombreux sont ceux qui voudraient plutôt développer un système de production intensif à l’européenne, pourtant inadapté à l’échelle du pays.

Ensuite viennent les facteurs naturels. Les sécheresses sont fréquentes, les feux de brousse menacent les pâturages et des épidémies touchent parfois les troupeaux.

Enfin, les vols de bétail augmentent, tout comme les conflits entre agriculteurs et éleveurs et les pratiques de déforestation (notamment pour la fabrication de charbon de bois). Dans toutes les communes apparaissent aussi des demandes d’affectation de terres : les grands cultivateurs d’arachide, situés juste au Sud, grignotent progressivement la zone sylvo-pastorale et des exploitants de gomme arabique commencent à s’installer.

Face à toutes ces menaces, EGAB travaille, avec ses partenaires, à préserver une mobilité apaisée, sans conflit, notamment par un travail de marquage et d’accords sociaux autour de couloirs transhumants. L’Entente apporte aussi des infrastructures à ses membres afin de maintenir des troupeaux en bonne santé donc productifs tout au long de l’année.

 

Rédaction : Noémie Lambert, bénévole

 

EN SAVOIR PLUS

Cet article est tiré du Supporterres n°1 d’Octobre 2017 : « Luttes paysannes ». Pour en savoir plus sur ces luttes, n’hésitez pas à consulter le numéro complet.

Luttes paysannes