13 mars 2025
JAGROS 2025 : Agir pour une agriculture juste et durable
Lire la suite13 décembre 2019
Le changement climatique affecte déjà la planète et ses habitants. La hausse des températures due à l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère est à l’origine d’événements climatiques extrêmes : vagues de chaleur, sécheresses et incendies, pluies torrentielles et tempêtes, diminution du débit des cours d’eau en été et augmentation en hiver avec des risques de crues, baisse du niveau des nappes phréatiques.
Les émissions mondiales de GES sont dues pour un quart aux pratiques agricoles et d’élevage qui, de plus, utilisent 75% des ressources en eau douce de la planète. Selon l’OCDE, « les principales émissions directes de GES d’origine agricole sont les émissions de protoxyde d’azote provenant des sols, des engrais, du fumier et de l’urine des herbivores et celles de méthane des ruminants et des rizières. » Vient ensuite le CO2.
L’élevage intensif demande de la terre pour le bétail. Les bois et les forêts sont abattus pour faire place aux prés. Or, les sols avec une couverture végétale et boisée absorbent 30% des émissions de CO2, contribuant ainsi à atténuer le réchauffement climatique.
Par ailleurs, pour nourrir ses immenses troupeaux, l’élevage intensif a recours au soja. En 2017, les pays de l’Union européenne ont ainsi importé 33 millions de tonnes de soja, principalement d’Amérique du Sud. Et qui dit importations dit émissions de CO2 liées au transport.
L’agriculture intensive, par souci de rentabilité, a également abandonné la mise en jachère des sols pour favoriser à la fois la monoculture et l’usage d’engrais chimiques à base d’azote qui finissent par se retrouver dans l’atmosphère.
Enfin, la mécanisation des pratiques, le chauffage des bâtiments, la chaîne de transformation et le transport du bétail et des produits sont encore d’autres sources d’émission de CO2.
Si les pratiques conventionnelles d’agriculture et d’élevage sont naturellement émettrices de GES, leurs dérives industrielles augmentent encore davantage ces émissions tout en accentuant leurs effets.
Alors que l’agriculture intensive est l’une des causes du changement climatique, les premières victimes de ces changements sont les femmes et les hommes qui vivent de la terre.
Si ces changements touchent tout le monde, l’impact reste plus important au Sud dont l’agriculture dépend davantage des pluies que de l’irrigation. Et c’est d’autant plus alarmant que dans le Sud, 60% de la population vit de l’agriculture.
Au Tchad, par exemple, depuis les années 1970, les précipitations ont baissé de 50% en moyenne sur l’ensemble du territoire.
Dans certaines régions, le manque d’eau et la désertification des terres ne permettent plus à l’agriculteur de se nourrir ni de nourrir la population. Les éleveurs et les agriculteurs manquant d’eau et de terres, beaucoup se déplacent à la recherche de nouveaux espaces. À l’insécurité alimentaire s’ajoute alors le risque d’instabilité sociale que ces déplacements peuvent engendrer.
Au Nord, ce sont des récoltes anticipées, des animaux souffrant de la chaleur, des sécheresses qui obligent à puiser dans les stocks de fourrages d’hiver pour nourrir les animaux l’été et des problèmes d’approvisionnement en eau et de rendements.
Pendant ce temps, les rapports du GIEC sur l’état du changement climatique se succèdent. Le dernier en date s’intéresse d’ailleurs à la gestion des sols et propose des pistes pour réconcilier agriculture et climat. Le politique, quant à lui, ne suit pas ou s’enfonce dans une certaine incohérence.
L’Union européenne signe ainsi le CETA, un accord commercial bilatéral de libre-échange qui réduit les barrières douanières entre le Canada et l’Union européenne. Cette dernière ouvre ainsi ses frontières aux importations en provenance d’un pays où les normes environnementales ne sont pas les mêmes. Elle poursuit par ailleurs la Politique agricole commune, un système de subventions qui soutient les grandes cultures, mise sur les exportations, pousse à l’investissement et à l’augmentation des rendements et n’apporte qu’une aide marginale au développement et à la transition vers un modèle agroalimentaire plus durable tel que l’agroécologie. De leur côté, la plupart des États africains non seulement attribuent des budgets dérisoires à l’agriculture et l’élevage, mais ils subventionnent les intrants chimiques.
Au-delà de l’urgence climatique et de l’impératif économique et social, il s’agit également d’une question de sécurité alimentaire, l’ONU prévoyant une population mondiale de 11 milliards d’individus en 2100. Il y a donc urgence à tous points de vue.
Rédaction : Laurent Stojka
Lire le numéro complet de Supporterres consacré au changement climatique (Décembre 2019)
https://www.sosfaim.be/changement-climatique-ecoutons-les-paysans/