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1 septembre 2022

La minga : pouvoir compter sur la force collective

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En Amérique andine, la minga, minka ou encore l’ayni, est une pratique traditionnelle collective de travail dans un esprit d’entraide et de solidarité. Elle peut aussi bien concerner une activité dont bénéficie directement la communauté dans son ensemble (repeindre l’école ou améliorer le chemin, en particulier lorsque l’état est déficient), que pour un membre à des fins privées, par exemple pour des travaux agricoles ou la construction d’une maison. Cette tradition est encore très pratiquée en particulier dans les zones rurales au sein des populations Quechuas et Aymaras, présentes principalement au Pérou, Equateur et Bolivie. Elle se réfère aux notions de réciprocité et d’interdépendance sur lesquelles se basent les relations aux autres, mais aussi avec la nature et le monde spirituel, selon la philosophie andine de la Cosmovision.

Modernité, vous avez dit ? A priori, on en est loin.

En un demi-siècle, ces pays ont atteint un taux d’urbanisation supérieur à 75% dans certains cas. Cela a permis l’émergence d’une classe moyenne plutôt aisée et l’entrée dans l’ère de la « modernité ». On pourrait ainsi imaginer que cette tradition de la minga devienne dépassée et progressivement abandonnée au profit d’un modèle plus individualiste, fondé sur l’économie de marché.

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Et pourtant, dans ces contextes très durement touchés par la pandémie de Covid avec des mesures de confinement strictes, cette pratique a encore révélé son importance. En Equateur, des femmes nous ont témoigné à quel point le groupe local auto-géré de micro crédit auquel elles appartiennent a été crucial dans les moments de grande vulnérabilité économiques et sociale. Cela pour couvrir des dépenses de santé immédiates ou relancer une activité par exemple. Ces groupes fonctionnent sur l’entraide et la confiance, en prêtant tour à tour à ses membres à partir d’un fond constitué collectivement par l’apport financier régulier de chacun et la capitalisation des intérêts des crédits. SOS Faim n’a apporté, dans ce cas, qu’un coup de pouce supplémentaire à une dynamique communautaire déjà engagée.

En contexte urbain aussi, dans la mégalopole de Lima (plus de 10 millions d’habitants), les ollas communes (« marmites communes ») ont permis, dans les zones les plus pauvres, de pallier la situation critique d’insécurité alimentaire provoquée par la pandémie.

Dans cette pratique qui n’est pas nouvelle mais qui se réactive en contexte de crise, plusieurs familles d’un même quartier rassemblent les ingrédients d’un repas élaboré et partagé collectivement.

Ces marmites communes sont devenues des organisations sociales communautaires avec un fonctionnement auto-géré bien établi et constitué en réseau. Elles constituent l’alimentation quotidienne d’environ 250.000 personnes à Lima.

Enfin, la minga peut aussi s’appliquer à des revendications politiques, comme en Colombie où le mouvement « Minga pour la vie » a rassemblé depuis 2008, sous ces principes, des milliers d’indigènes du pays lors de plusieurs marches pour revendiquer leurs droits, en particulier en faveur de la défense de leur territoire ; marches qui ont été malheureusement très violemment réprimées.

Rédactrice : Claire Stoeckel, responsable des partenariats au Pérou et en Bolivie

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