13 mars 2025
JAGROS 2025 : Agir pour une agriculture juste et durable
Lire la suite4 avril 2019
L’Association pour le Développement Intégré de Dahra (ADID) est clairvoyante sur la situation des éleveurs de la région et tente de répondre aux nombreux défis auxquels ils font face. Elle souhaite avant tout renforcer les capacités organisationnelles et institutionnelles de la société civile pastorale, promouvoir les bienfaits du lait frais et développer le réseau de partenaires.
Le soleil éclaire paisiblement le village de Linguère en ce début de journée. Fatima Ba part à la traite. Les tâches sont partagées entre elle et son mari : elle trait, nourrit les vaches et fait les tâches ménagères tandis que lui s’occupe du fourrage et se charge des vaccins. Il y a quelques années, ils se sont lancés dans la production de lait.
Pour Lébol Ba, éleveur et pharmacien à l’unité de transformation de Linguère, « Les bénéfices du lait apportent beaucoup à la famille et permettent d’assurer la scolarité des enfants. Mais la filière doit être davantage organisée et il faut lutter contre la concurrence déloyale incarnée par les importations de lait en poudre ».
Le cheptel familial compte 25 gobras, race bovine locale pour la viande, et 11 vaches laitières métisses issues d’un croisement entre une race locale et une race importée. Grâce à l’étable offerte par la PASA, un projet d’appui pour la sécurité alimentaire, ainsi que les micro-crédits proposés pour l’achat d’aliments de bétail, quatre de leurs vaches métisses, laissées en stabulation, produisent entre 12 et 16 litres de lait par jour. Une partie de la production permet de nourrir leurs six enfants et le reste est vendu à l’unité de transformation de Linguère, construite et gérée avec l’appui de l’Association pour le Développement Intégré de Dahra (ADID).
À 40 kilomètres de Linguère se trouve l’ADID, créée en 1990 par des éleveurs pour lutter contre l’exode rural. C’est une organisation de base soutenue par la FONGS (Fédération paysanne sénégalaise) et par le CNCR (Conseil National de Concertation des Ruraux), tous deux partenaires de SOS Faim. Elle est composée de 2113 membres répartis dans 13 sections villageoises et une section urbaine. À des kilomètres à la ronde, la réputation de l’organisation la précède, prouvant sa qualité et son succès auprès des consommateurs.
Pionnière, l’ADID a créé en 2000 la première unité de collecte et de transformation de lait de Dahra pour permettre aux femmes d’obtenir des revenus pour la traite, écouler la production des éleveurs, proposer des infrastructures de conservation et développer des emplois.
L’unité de transformation de Dahra est aujourd’hui en rénovation. Les murs sentent la peinture et des panneaux solaires attendent d’être installés. Arona Sow, Secrétaire Général de l’unité, explique qu’en saison haute, l’unité reçoit au moins 100 litres par jour, et parfois même, ne peut accepter tout le lait qu’on lui amène car sa capacité de stockage maximale est de 150 litres par jour. Il arrive que le lait soit transformé en lait caillé sucré mais Arona croit, à moyen terme, en la production de fromage car la conservation et le stockage seraient plus faciles pour l’unité et de plus gros volumes de lait pourraient être acceptés.
Les actions de l’ADID ne s’arrêtent pas là. En collaboration avec d’autres organisations d’éleveurs, l’association a réussi à sécuriser un couloir de transhumance de 37 kilomètres et a formé 50 auxiliaires vétérinaires répartis dans les 13 sections villageoises.
Le travail de l’ADID est conséquent, ses réussites sont multiples, mais pour combien de temps encore?
Samba Mamadou Sow, Président de l’association, souligne le dur combat à mener contre les « agrobusiness ». Selon lui, on rencontre trois types d’acteurs dans la filière lait au Sénégal : les éleveurs, les commerciaux et les « agrobusiness ». Lorsque d’un côté, l’agrobusiness se développe, produisant abondamment avec des vaches importées et toute une panoplie d’équipements, et que de l’autre, les commerciaux inondent le marché à travers la commercialisation de lait en poudre importé et un marketing efficace, les chances pour l’éleveur d’écouler sa production sont minces.
Face à ce défi, l’ADID souhaite avant tout renforcer les capacités organisationnelles et institutionnelles de la société civile pastorale, promouvoir les bienfaits du lait frais et développer le réseau de partenaires.
Florence Haumann, volontaire
Cet article est tiré du Supporterres n°7 de mars 2019 « N’exportons pas nos problèmes : surproduction de lait, ici et ailleurs les éleveurs boivent la tasse. »
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