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1 juillet 2021

Le combat d’Espérance pour une vie paysanne digne

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Dans les zones rurales, comme le Kongo central, SOS Faim soutient les familles paysannes qui peinent à vivre de leurs récoltes, avec une attention spécifique donnée aux femmes. Longtemps paupérisées par le poids des us et coutumes, les femmes rurales restent en RDC toujours désavantagées par rapport aux hommes et plus exposées aux injustices ainsi qu’à la pauvreté. Espérance Nzuzi a refusé cette fatalité ! Avec son association APROFEL, elle oeuvre chaque jour pour permettre aux femmes de son village de se soustraire au joug traditionnel et de retrouver confiance et espoir en l’avenir.

Un engagement fort suscité par son histoire personnelle

Maman Espérance, comme on l’appelle ici à Lukula, porte bien son nom. Cette femme débordante d’énergie a grandi au village. À l’initiative de l’une des organisations paysannes les plus importantes du Kongo central (FOPAKO), Espérance n’a pourtant pas eu l’opportunité de beaucoup étudier. Dès son plus jeune âge, elle est contrainte de travailler pour subvenir aux besoins de sa famille. À 14 ans, elle tombe enceinte et est confrontée à la dure réalité des mères-enfants, exclues du système scolaire et stigmatisées en raison des normes culturelles en RDC qui prohibent la sexualité préconjugale. Espérance se retrouve alors livrée à elle-même et fait face à une myriade de défis quotidien qui forgeront sa personnalité :

Espérance Nzuzi :  « j’ai eu une fille à 14 ans et le papa a pris la fuite au 5e mois de la grossesse et n’a pas assumé sa part de responsabilité. J’ai dû me prendre en charge et me débrouiller seule. C’était difficile, mais je suis parvenue à élever ma fille et à surmonter cette épreuve. Cela me donne aujourd’hui la force d’agir pour réveiller les consciences et sensibiliser les filles-mères ainsi que les familles paysannes de mon village. »

L’autonomisation des femmes rurales par le renforcement de l’agriculture familiale

Espérance s’est investie dans l’agriculture familiale qu’elle voit comme un levier d’action pour que les femmes et les familles de son village vivent décemment. C’est pour cette raison, qu’elle a fondé en 1993 APROFEL, une organisation très active dans le renforcement de l’agriculture familiale et la défense des intérêts des femmes rurales dans l’ensemble de la province du Kongo central.  Espérance aide ainsi les femmes rurales à se constituer en réseau pour assurer la défense de leurs intérêts et favoriser leur émancipation. Elle agit par le biais d’une ferme et des champs-écoles en misant sur la transmission de bonnes pratiques agricoles avec l’objectif que les femmes améliorent leurs rendements et leurs revenus.

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Espérance Nzuzi : «Nous travaillons à la multiplication des semences, particulièrement sur les filières du manioc, du maïs, du niébé, du soja, du riz, du palmier à huile, de la banane ou encore de l’ananas. Je veux encourager toutes les femmes de mon village à créer quelque chose même si elles n’ont pas de terrain. Ici, elles peuvent apprendre l’élevage, la pisciculture et des pratiques agroécologiques, comme l’association de cultures ou l’agroforesterie qui favorisent une production agricole durable. Une femme qui passe par mes champs-écoles a l’occasion d’apprendre quelque chose et de pouvoir ensuite en tirer une source de revenus pour payer les frais de scolarisation de ses enfants par exemple. ».

L’APROFEL aide aussi les organisations paysannes à trouver des débouchés, en les structurant sous forme de coopératives. Ces structures associatives fondées sur des valeurs d’entraide, d’équité et gouvernées par les membres eux-mêmes, sont particulièrement importantes pour les femmes rurales, car elles leur permettent de transformer leurs activités de survie en un travail productif et générateur de revenus.
Mais le travail d’Espérance ne s’arrête pas là :

Espérance Nzuzi : « Les producteurs et productrices ne peuvent pas toujours être au marché pour vendre leurs produits. Nous avons alors créé un partenariat entre les producteurs.rices du réseau et une association de femmes appelées « les maman manœuvres ». Ce sont des mères seules, en situation précaire, qui se sont mises ensemble pour vendre les produits des membres du réseau à un prix juste et équitable pour tou.te.s».

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L’association compte aujourd’hui 33 organisations paysannes et coopératives agricoles, intégrant plus de 1800 membres dont 1500 femmes.

Espérance Nzuzi : « Des hommes ont aussi rejoint l’association. On ne peut pas promouvoir les femmes en ignorant les hommes à leurs côtés.  Ma grande fierté aujourd’hui : c’est de voir des hommes qui adoptent cette dynamique de travail ».

Depuis 2008, SOS Faim soutient le travail d’Espérance qui a pu accompagner, en 2020, 1 263 familles paysannes dans l’adoption de bonnes pratiques agricoles (de la semence, à la commercialisation et la consommation). Espérance Nzuzi est aujourd’hui sans conteste une personnalité qui compte. Elle a même été nommée par le gouvernement congolais pour participer à un groupe de réflexion sur la filière agro-industrielle de sa région. Son combat de demain ? Renforcer le leadership féminin au Kongo central pour que les femmes rurales soient actrices de leur changement sur le champ !

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