13 mars 2025
JAGROS 2025 : Agir pour une agriculture juste et durable
Lire la suite5 mai 2022
En 2018, le Baromètre des agricultures familiales, une publication de Iles de Paix, SOS Faim et Autre Terre, expliquait qu’une transition vers un modèle mieux pensé en termes de production agricole est urgente et nécessaire.
Le 23 mars 2022, la Commission européenne a présenté un paquet de mesures pour la sécurité alimentaire mondiale qui inclut la possibilité d’utiliser des jachères. La Commission a également reporté la publication de son projet de directive limitant à 50% l’usage des pesticides à l’horizon 2030. Sur fond de guerre en Ukraine, les autorités européennes ont cédé aux pressions du lobby agro-industriel qui impose une révision à la baisse des objectifs environnementaux de la Politique agricole européenne et de la stratégique « De la ferme à la fourchette ». Au nom des besoins provoqués par la guerre, le retour d’une agriculture productiviste et destructrice du climat ne semble déjà plus poser de problème.
Selon Philippe Baret, professeur à l’UCL et président de SOS Faim, le récit qui annonce que la guerre en Ukraine impose de mettre un frein aux réformes prévues n’est que pure spéculation :
« On raconte qu’il va y avoir une crise mondiale, un problème de production, alors que pour l’instant il n’existe aucune certitude, aucun chiffre ne démontre ce récit. Il faut d’abord mettre l’ensemble des acteurs concernés autour de la table (…) Il faut analyser et évaluer les options. Nous avons le temps d’analyser la situation (…) Aujourd’hui, l’enjeu est d’assurer à long terme notre sécurité alimentaire en produisant sans être dépendant des énergies fossiles et sans impacter le climat (…) L’UE avait réfléchi au Green Deal pendant des années, puis en deux semaines, sous la pression des lobbys, on en arrive à tout laisser tomber pour relancer le vieux modèle de production sans se poser plus de questions (…) Il est scandaleux d’instrumentaliser les risques de pénuries alimentaires mondiales pour opposer un modèle à un autre (…) » (1)
« La réponse productiviste est largement insuffisante et elle ne répond que très partiellement à la problématique de la sécurité alimentaire. »
« Premièrement, elle en omet une partie des causes (la pauvreté, les inégalités) et elle en a une vision étriquée (la sécurité alimentaire ne se limite pas à un manque de calories, les carences en nutriments et l’obésité en font également partie). »
« Deuxièmement, elle encourage une intensification agricole qui a largement montré ses limites sociales et environnementales. »
« Troisièmement, elle délaisse la question des usages des produits agricoles. Or, il est possible d’augmenter sensiblement la disponibilité d’aliments sans pour autant produire plus, étant donné qu’une majorité des calories produites ne terminent pas dans nos assiettes. L’intensification agricole a clairement joué dans le passé contre les petits producteurs agricoles, et l’agriculture familiale en général, en favorisant les plus gros producteurs, en augmentant les inégalités et en impactant négativement l’environnement. La peur de la pénurie permet de voir toute autre conséquence négative du système agricole comme un moindre mal, et donc de ne pas remettre en cause le système et ceux qui en profitent. Il est pourtant temps de sortir de ce paradigme productiviste. Le business as usual dans l’agriculture a un coût environnemental, sanitaire et social qui ne sera pas tenable à long terme (…) »
A relire :
Le Baromètre 2018 des agricultures familiales
(1) Philippe Baret en interview sur la chaîne YT de L’Avenir.
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