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28 juin 2021

Système alimentaire mondialisé : très profitable pour certains, insoutenable pour d’autres

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Depuis plus d’un demi-siècle, avec le changement de nos modes de vie, l’exode rural qui a éloigné les consommateurs des zones de production alimentaire et l’apparition  progressive de nouvelles activités dans le secteur agro-alimentaire, il n’est bientôt plus  question uniquement de cultiver pour (se) nourrir : il s’agit aussi de transformer, de  transporter, d’exporter, de distribuer etc. Le terme de « système alimentaire » recouvre la  multiplicité de ces activités et de ces acteurs ainsi que l’allongement de la chaîne de  valeur.

LE SECTEUR ALIMENTAIRE :  FRUCTUEUX MAIS PAS POUR TOUT LE MONDE

Si, par le passé, un yaourt était fabriqué et transformé à la ferme puis simplement vendu  aux consommateurs, avec l’arrivée de nouveaux acteurs dans le système alimentaire  mondialisé, ce schéma s’est plutôt raréfié. Aujourd’hui, en cumulant les distances  parcourues par les différents composants « nécessaires » à sa fabrication, sa livraison et,  enfin, sa consommation, il lui aura fallu 8000 kms.

Les intermédiaires qui font partie des systèmes alimentaires sans pour autant ni produire,  ni consommer, ont pour principal but d’ajouter de la valeur et de générer des profits. Un  des plus connus est le supermarché, qui peut acheter des produits directement à un producteur pour les revendre ensuite directement à un consommateur. Mais plus  fréquemment les marchandises sont achetées à un grossiste qui est, lui, spécialisé dans les très grandes quantités. Et la chaîne peut s’agrandir encore et encore. Parmi les autres maillons, on peut citer les entreprises de transports, en général très subventionnées, ou  encore les agences de publicité.

L’un des autres maillons les plus importants de nos systèmes alimentaires mondialisés est devenu l’entreprise de transformation spécialisée des denrées. Aujourd’hui, un produit  peut être transformé dans de nombreuses zones différentes avant d’être consommé. Jean-Louis Rastoin, ingénieur agronome, parle d’« une industrie d’assemblage  d’ingrédients venus des quatre coins du monde » plutôt que d’une industrie  agro-alimentaire. Ces industries de transformation, acteurs intermédiaires parmi d’autres,  viennent allonger la chaîne agroalimentaire, qui va « de la fourche à la fourchette », et même jusqu’à la poubelle.

Plus on fait entrer d’intermédiaires dans le système alimentaire, plus on divise les parts d’un seul gros gâteau. Malheureusement, ces parts ne sont pas  divisées de manière égale ou juste. Agissant à l’échelle mondiale, ces acteurs  intermédiaires ont pour principal but de générer des profits. Ils sont ainsi guidés par la  consommation de masse, s’appuient sur des modes de production très rapides et très productifs et produisent des denrées plus standardisées car plus faciles à écouler. Devenus incontournables dans le système alimentaire, ces intermédiaires imposent des marges toujours plus grandes au détriment des producteurs : ainsi lors de la production  d’un yaourt, le producteur de lait ne reçoit que 7% de son prix de vente.

« Cette multiplicité d’activités et d’acteurs, l’importance de la fonction alimentaire, font que  le système alimentaire est devenu, dans la plupart des pays, le premier secteur économique par le nombre d’emplois et le chiffre d’affaires. »

Jean-Louis Rastoin

UN VILLAGE MONDIALISÉ QUI COUTE CHER

L’idée d’un village mondialisé peuplé de citoyen.ne.s qui mangent le même yaourt n’est  pas sans revers. On parle ainsi de « coûts cachés » car difficilement visibles aux yeux des consommateurs.

Avec ses 8000 kms parcourus par divers moyens de transports polluants,  l’exemple du yaourt permet de prendre conscience du coût environnemental lié  à l’offre d’un seul produit dans nos systèmes alimentaires intensifs. D’autres coûts sont  plus difficiles à calculer, notamment les coûts sociaux, politiques, sanitaires, économiques, même s’ils sont bien réels.

Un coût non négligeable est induit par le gaspillage. Un récent rapport de l’ADEME  indique qu’à chaque étape du système alimentaire, de la production à la consommation, se trouve une part de gaspillage.

On peur retracer toutes ces étapes. Au début de la  chaîne, il y a la production, où l’on estime que 32% des denrées sont jetées à cause de  leur calibre ou bien car elles ont été abîmées durant la récolte. Ensuite, lors de la  transformation et du transfert, ce sont 21% des denrées qui sont écartées de la chaîne  pour cause de conditionnement défectueux ou rupture de la chaîne du froid. Puis, dans le  secteur de la distribution, on compte 14% de pertes liées à la dégradation des denrées qui ont trop voyagé et aux invendus. Enfin, lors de la consommation, on estime à 33% le  gaspillage lié aux repas non terminés ou aux produits périmés. Plus la chaîne est grande, plus les denrées passent de lieux en lieux, plus il est difficile de ne pas en perdre en  chemin.

L’une des solutions proposées serait de revenir à un modèle où l’on défend  l’intérêt général plutôt qu’un intérêt économique qui profite aux plus grosses industries agro-alimentaires. Cela comprendrait des aides à la relocalisation de l’agriculture mais  aussi des sanctions pour punir la concurrence déloyale ou les modes de production
extrêmement polluants.

Rédactrice : Adèle Funès

POUR EN SAVOIR PLUS

LISEZ « Les coûts cachés de l’alimentation », Défis Sud

REGARDEZ « Les coûts cachés de l’alimentation industrielle », JAGROS

Cet article est tiré du Supporterres n°16 « Mieux produire, mieux se nourrir. Pour des systèmes alimentaires durables. »