20 janvier 2025
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Lire la suite1 mars 2024
Depuis près de trois mois, les manifestations agricoles se multiplient en Europe (Allemagne, France, Belgique, Espagne, Grèce et Portugal notamment) pour réclamer de meilleurs revenus, un soutien public accru et l’arrêt immédiat des accords de libre-échange, en particulier de l’accord UE-Mercosur.
En Inde, les manifestations massives qui ont eu lieu il y a deux ans ont abouti à une impasse, sans changements majeurs. Aujourd’hui, les protestations refont surface avec une demande d’un prix administré garanti par le gouvernement auquel les produits seront achetés aux agriculteur·ice·s.
« Les manifestations d’agriculteur·ice·s auxquelles nous assistons actuellement dans le monde entier en disent long sur les limites d’un système alimentaire fondé sur le libre-échange sans protection pour les agriculteur·ice·s les moins bien armé·e·s. Les pays ont besoin d’une plus grande marge de manœuvre pour réguler leur marché et garantir des revenus décents aux agriculteur·ice·s. Les règles actuelles de l’OMC n’autorisent pas cette liberté. En revanche, ces règles permettent aux grandes entreprises de prospérer et placent de plus en plus de personnes dans une situation d’insécurité alimentaire », a déclaré Jonas Jaccard, chargé de plaidoyer pour Humundi (Belgique).
Ironiquement, au même moment, les pays membres de l’OMC négocient sur l’agriculture dans le cadre de la 13e conférence ministérielle qui a lieu à Abou Dhabi (MC13). Et les propositions qui sont sur la table renforcent les préoccupations des agriculteur·ice·s du monde entier concernant ce système injuste et inéquitable.
D’une part, les pays développés* et les pays agro-exportateurs (groupe du Cairns) exigent de nouvelles solutions fondées sur le libre marché pour résoudre le problème de l’insécurité alimentaire mondiale. D’autre part, les pays en développement* demandent une plus grande marge de manœuvre politique pour pouvoir développer leur agriculture, au travers notamment de mécanismes tels qu’une solution permanente sur le stockage public (PSH) pour des raisons de sécurité alimentaire et un mécanisme de sauvegarde spécial (SSM).
Malgré une proposition (JOB/AG/229) soumise en 2022 par 80 pays couvrant le groupe africain, les pays Afrique, Caraïbes et Pacifique (ACP) et le G33 – soit près de la moitié des pays membres de l’OMC et recouvrant près de 80% de la population mondiale – demandant une solution permanente sur les stocks publics, celle-ci n’a à ce jour pas été discuté. Il s’agit pourtant d’une promesse faite à Bali en 2013 lors de la 9e conférence ministérielle. Une solution permanente sur les stocks publics reste donc bloquée à ce jour.
De même, un mécanisme de sauvegarde spéciale, destiné à protéger les pays en développement* contre les hausses subites d’importations détruisant les moyens de subsistance de l’agriculture locale et créant beaucoup d’incertitudes sur les possibilités d’investissement, est également bloqué.
« Pour nous, et pour nos frères et sœurs agriculteur·ice·s des pays en développement* et des pays les moins avancés*, la solution permanente sur les stocks publics est un outil politique essentiel pour soutenir notre agriculture et garantir nos moyens de subsistance. Cela est également essentiel pour que nos programmes alimentaires publics fonctionnent et garantissent la sécurité alimentaire de nos citoyen·ne·s. La clause de paix signée à Bali est inefficace pour atteindre son objectif, car elle a été criblée de limitations et de conditionnalités contraignantes et irrationnelles. De même, le mécanisme de sauvegarde spéciale aurait dû être accordé il y a bien longtemps et nous l’exigeons immédiatement » a déclaré K V Biju, coordinateur de Samyukta Kisan Morcha (NP), une organisation représentant plus de 3 millions d’agriculteur·ice·s en Inde.
Jusqu’à présent, l’OMC n’a pas réussi à protéger les petit·e·s agriculteur·ice·s et à résoudre le problème de la sécurité alimentaire dans les pays du Sud global, puisque le nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde n’a pas diminué. Aujourd’hui, les agriculteur·ice·s du Nord se joignent également à ce combat.
Toutes les questions d’intérêt crucial pour les pays en développement* et les pays les moins avancés* risquent une fois de plus d’être négligées. Dans le même temps, un programme de libéralisation totale est mis en avant, même s’il a échoué à maintes reprises, tant dans le Nord que dans le Sud global.
* Bien que ne correspondant pas à notre vision, nous reprenons ces termes, car ils correspondent aux catégories de pays utilisés dans le langage OMC
Une opinion de Our World is not for Sale, Humundi, Third World Network, Samyukta Kisan Morcha.