13 mars 2025
JAGROS 2025 : Agir pour une agriculture juste et durable
Lire la suite11 octobre 2017
La démocratisation qui touche certains pays du Sud depuis une quarantaine d’années a donné un nouveau visage aux dynamiques des luttes paysannes. Les communautés locales ont ainsi pu profiter d’une ouverture pour s’exprimer, s’organiser et ainsi défendre leurs droits et leurs territoires.
L’époque coloniale fut marquée par l’introduction des grandes cultures commerciales (coton, canne à sucre, café). Les rapports de force entre petits et grands producteurs ont rapidement tourné en faveur des seconds. Tandis que les premiers ont vu se restreindre leur accès à la terre et aux ressources, mettant en péril leur sécurité alimentaire.
Les années 80 et leur lot de mesures d’ajustement structurel ont ensuite porté un coup supplémentaire au respect des droits des paysans. À cette époque, les organismes financiers internationaux recommandent aux gouvernements du Sud de se spécialiser autour de quelques cultures d’exportation. Cela engendre une vaste (re)conversion des terres vivrières au profit de cultures commerciales. Celles-ci sont gourmandes en intrants et en capitaux.
En parallèle, les marchés agricoles sont libéralisés. Cela induit une concurrence entre des produits agricoles issus de contextes de production très différents sur un marché commun. Cette compétition est déloyale. Les petits producteurs qui travaillent sur de petites superficies ont des productions moindres et ne peuvent proposer des prix compétitifs.
Ce contexte a largement stimulé des dynamiques d’appropriation des terres, renforcées plus tard par la crise alimentaire de 2008. Certains paysans ont ainsi été privés du droit d’usage de leur terre, ressource première à toute activité agricole.
Face à ces nombreuses injustices, on observe un large panel de réactions qui, lorsqu’elles sont organisées, peuvent être qualifiées de « mouvements ». En effet, ce terme peut être compris comme un type d’action collective concertée en vue d’une cause à défendre.
Les mouvements paysans existent sous de nombreuses formes qui dépendent fortement du contexte dans lequel ils naissent et évoluent. Les acteurs de ces mouvements vont des petits propriétaires aux travailleurs informels, en passant par les cultivateurs, les éleveurs, les salariés ruraux, etc. Tous luttent pour des enjeux primordiaux, généralement articulés autour des combats suivants : la lutte contre la faim, la défense de l’accès à la terre et aux ressources, un revenu juste, la défense des droits des femmes et bien d’autres.
Il n’est donc pas possible de définir de manière précise le concept de « mouvement paysans » tant les contextes, les acteurs et les enjeux sont variés. Cependant, ces différents mouvements présentent des points communs.
Tout d’abord, les mouvements paysans constituent une réponse des communautés rurales pauvres aux grands changements qui ont transformé les campagnes ces 40 dernières années, suite notamment à l’expansion sauvage du modèle agrobusiness. Celui-ci a conduit les exploitations à croître de manière exponentielle, se mécaniser et se spécialiser dans quelques cultures. Les petits producteurs sont confrontés directement à ces puissants opérateurs de l’agrobusiness, et doivent s’organiser afin de rétablir un minimum d’équilibre dans les rapports de force.
L’existence de dispositifs ou de relais organisationnels (associations, ONG, syndicats, etc.) joue un rôle primordial dans la mobilisation des mouvements sociaux. En effet, ils permettent de centraliser et de porter les revendications des populations rurales souvent marginalisées politiquement.
Parallèlement à la mondialisation des enjeux agraires et à la multiplication des conflits dans le monde rural, les paysans du monde se regroupent. Ainsi, en formant des coalitions régionales, nationales et même internationales (Via Campesina, Mouvements des sans terre, etc.), les acteurs du monde rural donnent une visibilité nouvelle et plus large aux luttes paysannes. Ils font entendre leur voix, afin de lutter contre les causes structurelles de la faim, pour le respect de leur droits.
Rédaction : Fanny Warsztacki, bénévole
Cet article est tiré du Supporterres n°1 d’Octobre 2017 : « Luttes paysannes ». Pour en savoir plus sur ces luttes, n’hésitez pas à consulter le numéro complet.