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9 mars 2018

Politique agricole en Bolivie: des promesses semées à tous vents ?

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L’accession au gouvernement d’Evo Morales en 2005  en tant que premier Président d’origine amérindienne et fils de paysans, représentait un réel espoir pour le peuple bolivien. Bien que le ratio de la pauvreté soit descendu de 20% depuis son élection, deux tiers de la population vit encore sous le seuil de pauvreté.

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En décembre 2005, Evo Morales est élu Président à 54% des voix

De hauts espoirs avec un paysan au pouvoir

De 1985 à 2003, l’élection du Président par le peuple devait être garantie par un second tour au Congrès. Les principaux acteurs politiques négociaient des accords politiques et le Président ne pouvait entrer en fonction qu’après la conclusion d’un “pacte” entre partis politiques. A cette époque, les orientations prises par le gouvernement servaient surtout l’intérêt des entreprises privées. On pouvait distinguer alors “deux Bolivies” : une Bolivie rurale laissée pour compte au profit d’une Bolivie urbaine favorisée. La population rurale a d’ailleurs baissé de 13% à cette époque.

En décembre 2005, Evo Morales est élu président à 54% de voix. Il gagne la confiance du peuple en plaçant les droits de la nature et de la Terre Mère au centre de son modèle de développement. Fils de paysans et cultivateur de coca, Evo Morales propose des objectifs tels que la lutte contre la pauvreté et la corruption, ainsi que l’intégration des peuples indigènes dans la vie sociale et politique.

Les avancées sociales sous Morales

Le nouveau gouvernement instaure une politique d’austérité en coupant dans les salaires du Président et des fonctionnaires de l’État pour investir dans la santé et l’éducation. Il offre une légitimité politique aux secteurs populaires et sociaux. Hormis les partis traditionnels, le gouvernement est désormais composé d’organisations sociales d’indigènes, de paysans et d’ouvriers. Des progrès significatifs sont ainsi réalisés en matière d’alphabétisation, d’accès à l’éducation et aux soins de santé et de lutte contre la pauvreté.

Dans le secteur de l’agriculture, une vision de développement durable semble également se développer. Ainsi, Morales promulgue des lois favorables aux petits producteurs et artisans, à l’agriculture biologique et à la protection de l’environnement et de la Terre-Mère.

Cependant, les campagnes continuent de se vider.

Les désillusions ne tardent pas à se faire sentir

Malgré les discours et les lois en leur faveur, les campagnes ne bénéficient pas de l’aide prévue par le gouvernement. Les circuits administratifs sont lents et ralentissent le flux des budgets vers les municipalités plus isolées et les fonds alloués aux communautés sont souvent détournés.

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Le discours ne correspond pas à l’action. Les campagnes sont à nouveau laissées pour compte, et les villes se paupérisent

Alex Flores, fils de paysans et technicien d’AGRECOL, s’exprime sans concession : « C’est nous qui avons porté Evo au pouvoir. Il a été très bon les premières années. Aujourd’hui, c’est la décadence ! On a beaucoup travaillé, lutté pour arriver là où on en est, et avec la corruption, tout peut retomber. À ce moment-là [en 2005] aussi j’avais appuyé Evo, mais aujourd’hui il veut rester au pouvoir et je pense que c’est mal. »

Un développement rural plus indépendant

Malgré ce contexte peu favorable, des ONG comme CIUDADANIA ou AGRECOL, partenaires de SOS Faim, travaillent de concert avec les gouvernements municipaux dans la région de Cochabamba espérant les impliquer de manière durable dans le soutien à l’agriculture familiale durable. En parallèle, ces structures renforcent les dynamiques paysannes, désormais transformées en organisations économiques pour certaines, qui peuvent évoluer de manière indépendante dans un pays où le gouvernement central semble trop souvent les oublier.

ACTU

En novembre 2017, Evo Morales a obtenu du Tribunal Constitutionnel la possibilité de briguer un 4ème mandat. Il contourne ainsi la Constitution de 2009, qu’il avait lui-même contribué à façonner, et qui prévoit qu’un candidat ne peut se présenter plus de deux fois à la présidence. Il fait fi également des résultats du référendum de 2016 où le « NON » l’a remporté à 51,3%.

 

 

Rédaction : Justyna Dunin-W., bénévole

 

EN SAVOIR PLUS

Cet article est tiré du Supporterres n°3 de mars 2018 « Le Pachamama dans tous ses Etats ». Pour en savoir plus sur nos partenaires et bénéficiaires boliviens, découvrez le numéro complet.

La Pachamama dans tous ses Etats